Automatisation, IA et anxiété : des politiques pour éviter le populisme
La nature changeante du travail : série sur des enjeuxEnsemble, l’automatisation et l’intelligence artificielle (IA) ont le potentiel de transformer fondamentalement l’économie et la vie sociale. Comment ces tendances influeront-elles sur la politique et les politiques publiques? Accroîtront-elles ou diminueront-elles l’attrait pour le populisme? Faciliteront-elles ou rendront-elles plus difficile l’élaboration des politiques publiques par les gouvernements?
Le présent rapport explore le potentiel de l’automatisation et de l’IA à entraîner des troubles politiques et des changements au Canada. Pour examiner cela, nous étudions quatre questions connexes portant sur l’automatisation et l’IA :
- Les citoyens et citoyennes sont-ils bien informés au sujet de l’automatisation et de l’IA?
- À quels effets peuvent-ils s’attendre pour eux-mêmes, pour l’emploi et l’économie, et pour la société?
- Dans quelle mesure sont-ils inquiets des effets potentiels de l’automatisation et de l’IA?
- Quels types de politiques et d’ensembles de réponses politiques les citoyens et citoyennes sont-ils prêts à soutenir pour relever les défis (et les possibilités) de l’automatisation et de l’IA?
Pour comprendre le point de vue des citoyens et citoyennes sur l’automatisation et l’IA et leurs préférences en matière de politiques, nous avons mené un sondage auprès de 1 995 Canadiens et Canadiennes en mai et juin 2019. L’échantillon de notre enquête a été tiré de multiples groupes de personnes selon des quotas d’âge, de sexe et de région, constituant un échantillon représentatif de la population. Notre but est de comprendre comment l’exposition objective des sujets à l’automatisation et à l’IA et leurs propres croyances à ce sujet – qui peuvent ne pas correspondre – sont liées à leurs préférences pour les diverses réponses politiques aux défis de l’automatisation et de l’IA.
Conclusions
Nous avons constaté que les individus n’ont pas aligné leurs attentes des effets de la perte d’emploi due à l’automatisation et à l’IA avec leur propre exposition réelle. Les individus sous-estiment régulièrement leur propre exposition. Quand il faudra se recycler, ce sera un choc, mais alors un très grand choc pour beaucoup. Les décideurs politiques pourront encourager les personnes à tirer parti des possibilités de recyclage seulement si les personnes qui se trouvent sur le marché du travail comprennent qu’il est nécessaire pour elles de se recycler. Par conséquent, il est urgent de comprendre comment les individus peuvent améliorer leurs connaissances sur les compétences particulières dont ils ont besoin pour l’avenir de leur travail.
Les implications politiques de nos conclusions sont aussi importantes que les implications en matière de politiques techniques :
- Les citoyens et citoyennes – en particulier ceux qui s’inquiètent de la perte de leur emploi due à l’automatisation et à l’IA – sont prêts à soutenir un large éventail de politiques pour remédier aux inconvénients de ces technologies. Les politiciens et politiciennes disposent d’une marge de manœuvre importante pour répondre à leurs préoccupations. Ils devraient établir un lien direct entre les politiques offertes et les appréhensions raisonnables que les personnes ont à l’égard de l’automatisation et de l’IA.
- Les préoccupations des citoyens et citoyennes au sujet de l’automatisation et de l’IA ne se limitent pas à la perte de leur emploi. Les personnes sont également préoccupées par la mobilité et les inégalités sociales et économiques. Les politiciens et politiciennes devraient rechercher des solutions politiques qui tiennent compte non seulement de l’automatisation et des perturbations à court terme de l’IA, mais également de leurs effets potentiels à long terme sur le dynamisme social et économique. Ils peuvent reconnaître le potentiel économique transformateur de l’automatisation et de l’IA tout en avançant l’argument que les avantages de ces technologies devraient être largement et raisonnablement partagés.
- Enfin, malgré nos constatations établissant un lien entre la crainte de perdre son emploi et le populisme et le nativisme, nous ne trouvons pas de lien direct et clair entre la crainte des citoyens et citoyennes de perdre leur emploi et leur exposition à l’automatisation, d’une part, et leur intention de voter lors de la prochaine élection, de l’autre. De même, nous ne constatons pas que la crainte de perdre son emploi soit liée à l’évaluation par les citoyens et citoyennes du parti politique qui est le mieux placé pour gérer le changement technologique.
Le terrain de jeu est ouvert aux partis entreprenants qui souhaitent relever ce défi politique. Nos partis politiques devraient le faire avec une profondeur et une réflexion à la hauteur du défi.
Regardez : Peter Loewen présente ses conclusions à la conférence Brave New Work
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