Automatisation, IA et COVID-19
Série | Les enjeux principaux de La Nature changeante du travailRÉSUMÉ
Un article intitulé « Automatisation, IA et anxiété : des politiques pour éviter le populisme », du Forum des politiques publiques, indique qu’il y a un lien entre la crainte de perdre son emploi à cause de l’automatisation et le soutien à des gouvernements populistes parmi les personnes qui ont peur de perdre ou de voir les autres perdre leur emploi. L’article a également démontré que les personnes qui craignaient l’automatisation, que ce soit pour elles-mêmes ou pour les autres, souhaitaient que le gouvernement joue un rôle plus actif en réponse à cette économie émergente. Les gouvernements se retrouvent donc face à un choix : répondre aux craintes liées à l’automatisation par le truchement de diverses politiques ciblées et efficaces, ou laisser le champ libre aux personnes qui, au lieu d’agir, emploieraient la recette bien connue du protectionnisme et de la vénération de la classe ouvrière.
L’objectif du présent rapport est de revisiter le contexte de ce premier article pour expliquer ce qui a changé à la lumière des perturbations massives causées par la COVID-19 et de la fermeture de l’économie canadienne qui a suivi. Pour mieux comprendre ces dynamiques en évolution, nous examinons trois questions connexes :
- La COVID-19 a-t-elle accentué les craintes des Canadiens et Canadiennes à l’égard de l’automatisation et de l’intelligence artificielle (IA)?
- Les citoyen.ne.s souhaitent-ils/elles plus, ou moins d’intervention du gouvernement en réponse au double défi de la COVID-19 et de l’automatisation et l’IA?
- Ces demandes sont-elles plus pressantes parmi les personnes qui ont subi une perte d’emploi ou de revenu en raison des fermetures?
Pour comprendre l’opinion des citoyen.ne.s sur l’automatisation et l’IA dans le contexte de la pandémie mondiale de COVID-19, nous avons interrogé 1 920 Canadiens et Canadiennes en mai et juin 2020 et 603 autres en avril 2021.
Résultats
Les Canadiens et Canadiennes s’inquiètent des effets à long terme de la COVID-19 sur le marché du travail. Les personnes interrogées sur les pertes d’emplois voient des liens entre l’adoption croissante de l’IA et de l’automatisation et les défis en matière d’emploi posés par la COVID-19. L’adoption de l’IA et de l’automatisation ne s’arrêtera pas à la fin de la pandémie. Par conséquent, nous devons mieux comprendre comment les individus ont choisi de se préparer et de se doter de compétences pour un marché du travail changeant. En particulier, nous constatons que :
- La révolution technologique à venir n’est pas totalement inattendue, car une majorité de Canadiens et Canadiennes affirment avoir au moins une compréhension de base de l’IA et de l’automatisation. Les politicien.ne.s ont l’occasion de tirer parti de cette connaissance (perçue) pour relever les défis à venir. Ils/elles devraient envisager de relier les solutions à la COVID-19 aux défis posés par l’IA et l’automatisation.
- Les Canadiens et Canadiennes sont profondément préoccupés par le fait que leurs emplois et ceux des membres de leur famille et de leurs ami.e.s risquent de disparaître à cause de l’automatisation et de l’IA dans les cinq à vingt-cinq prochaines années.
- Les citoyen.ne.s s’inquiètent du fait que leurs compétences professionnelles ne suivent pas l’évolution de l’économie. Ils/elles sont également très préoccupés par les effets à long terme de l’automatisation et de l’IA sur la mobilité sociale et les inégalités économiques. Les décideurs.euses politiques doivent rechercher des solutions équitables, en prenant soigneusement en compte les personnes susceptibles d’être touchées négativement.
- Quatre Canadiens et Canadiennes sur dix pensent que le gouvernement devrait sanctionner les entreprises qui réduisent leur main-d’œuvre par le recours à l’automatisation et à l’IA. De même, un pourcentage similaire pense que les consommateurs.rices devraient boycotter ces entreprises et que celles-ci devraient continuer à employer des travailleurs.euses même lorsque la technologie qui effectue ce travail plus efficacement existe. Les décideurs.euses politiques doivent tenir compte du fait que le public va parfois préférer des politiques punitives à l’égard des entreprises qui ont des répercussions négatives sur les travailleurs.euses.
- Enfin, les personnes qui ont perdu leur emploi à cause de la pandémie de COVID-19 sont légèrement plus susceptibles d’être favorables à la réduction des niveaux d’immigration et à l’accroissement du financement des programmes universitaires STIM que celles qui n’ont pas perdu leur emploi à cause de la pandémie. Les politicien.ne.s doivent veiller à ne pas accroître les attitudes nativistes parmi les personnes les plus touchées.
Nous vivons une période de changement sans précédent du marché du travail et d’innovation technologique. Les politicien.ne.s ont l’occasion de répondre non seulement à la crise actuelle, mais aussi à celles qui se profilent à l’horizon.