Résoudre les pénuries à l’Île-du-Prince-Édouard : les expériences des employeurs et le marché du travail
Le project Immigration et revitalisation de l’Atlantique du FPP examine la rétention des immigrants et ce rapport, en partenariat avec l’université Memorial, examine les pénuries de main-d’oeuvre qualifiée partout le Canada atlantique.
Les employeurs se démènent pour trouver les compétences et la main-d’œuvre dont ils ont besoin pour leurs activités. Cette situation touche toutes les entreprises, de la plus grande à la plus petite.
Penny Walsh-McGuire, PDG, Chambre de commerce du Grand Charlottetown
La plupart des pays industrialisés connaissent des pénuries croissantes de travailleurs et travailleuses causées par le faible taux de natalité et le vieillissement de la population, ainsi que des écarts de compétences causés par les nouvelles technologies qui exigent des travailleurs et travailleuses possédant de nouvelles compétences. Un sondage mondial mené auprès d’environ 40 000 employeurs dans 43 pays et territoires a révélé que 45 % des employeurs ont déclaré avoir des pénuries de compétences[1]. Les pénuries de main-d’œuvre et de compétences peuvent avoir d’importantes répercussions négatives à court et à long termes sur la croissance durable, la productivité, l’innovation et la compétitivité des entreprises et de l’économie nationale.
Les provinces de l’Atlantique font face à de graves défis démographiques découlant de plusieurs facteurs, notamment le taux de natalité le plus bas au Canada, l’âge moyen le plus élevé et une émigration importante. Les provinces de la région partagent en commun de nombreuses caractéristiques, y compris une géographie éloignée et isolée, un accroissement démographique historiquement faible et la dépendance aux ressources naturelles. Le déclin continu de la population naturelle, le nombre croissant de baby-boomers qui partent à la retraite et les faibles taux d’immigration et de rétention par rapport à d’autres régions du Canada donnent l’image d’une main-d’œuvre régionale qui risque de diminuer encore davantage sans intervention extérieure. De 2012 à 2018, la population active au Canada atlantique a diminué de 54 400 personnes[2]. En ce qui concerne le vieillissement de la population, en 2018, les personnes âgées de 65 ans et plus représentaient 20,5 % de la population de la région de l’Atlantique[3]. Ce groupe d’âge devrait passer à 30,9 % d’ici 2035, avec une prévision de baisse de 5 % de la population totale de la région[4].
Il existe deux grands types de pénuries de main-d’œuvre et de compétences : cycliques et structurelles. Les pénuries cycliques de main-d’œuvre et de compétences sont de courte durée et peuvent être atténuées par une augmentation des salaires, des campagnes de recrutement et des pratiques innovantes en milieu de travail[5]. Toutefois, sous l’effet des changements démographiques et technologiques, les pénuries structurelles de main-d’œuvre et de compétences peuvent être difficiles à atténuer à court terme en raison d’une pénurie de travailleurs et travailleuses potentiel.le.s possédant les types de compétences et d’expériences requises[6].
De nombreuses industries et entreprises du Canada atlantique connaissent actuellement des pénuries structurelles de main-d’œuvre et de compétences en raison de l’interaction entre les facteurs démographiques et les nouvelles technologies qui stimulent la productivité.
Quelles sont les causes des pénuries de compétences et de main-d’œuvre à l’Île-du-Prince-Édouard?
L’Île-du-Prince-Édouard a plus que doublé son taux d’immigration au cours de la dernière décennie. Environ 16 % de ces immigrants et immigrantes restent plus de cinq ans.
Les facteurs démographiques, économiques, technologiques et de politiques publiques ont un effet significatif sur les pénuries de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s. Les facteurs démographiques et technologiques sont des facteurs structurels qui entraînent des pénuries de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s, tandis que les facteurs économiques et de politiques publiques pourraient renforcer ou atténuer les pénuries de compétences causées par des facteurs structurels. Les effets précis de ces facteurs sur le marché du travail de l’Île-du-Prince-Édouard (Î.-P.-É.) sont présentés ci-dessous.
Démographie
Les tendances démographiques ont des répercussions sur l’offre de compétences et de main-d’œuvre par le changement de la taille et de la structure de la population active.
Depuis 2014, l’Î.-P.-É. connaît un accroissement démographique continu, qui est le plus élevé parmi toutes les provinces et tous les territoires, soit 2,19 % en 2019. Cette croissance est le fruit des efforts fructueux déployés par la province en matière d’immigration[7].
Tableau 1. Caractéristiques démographiques du Canada et des provinces de l’Atlantique[8],[9],[10]
Figure 1. Structure démographique de l’Île-du-Prince-Édouard[11].
Cependant, en 2019, les décès ont dépassé pour la première fois le nombre de naissances[12]. La figure 1 permet d’imaginer la baisse de la population active, montrant que les personnes de 5 à 14 ans sont beaucoup moins nombreuses que celles âgées de 55 à 64 ans. La population des 15 à 54 ans est passée de 54,1 % en 2009 à 49,8 % en 2019, tandis que le groupe des 65 ans et plus n’a cessé d’augmenter. Le nombre de ces Canadiens et Canadiennes plus âgé.e.s a augmenté, passant de 15,3 % en 2009 à 19,7 % en 2019. L’âge médian de la province est de 43,2 ans, soit 2,4 ans de plus que la moyenne nationale en 2019[13]. L’Î.-P.-É. a donc de bonnes raisons d’accroître sa population par l’immigration (voir tableau 1).
Croissance économique
L’Î.-P.-É. a connu une croissance conomique continue au cours de la dernière décennie, passant de 0,2 % à 4,4 %. L’expansion économique entraîne généralement une augmentation de l’emploi. Selon un récent sondage auprès des employeurs mené par l’Université Memorial en collaboration avec le Forum des politiques publiques dans les provinces de l’Atlantique, 68 % des employeurs de l’Î.-P.-É. ont connu une croissance des ventes et 65 % une croissance de l’emploi au cours des trois dernières années. La majorité des employeurs s’attendent également à une augmentation continue des ventes et de l’emploi au cours des trois prochaines années. Du même coup, la province a connu une explosion immobilière massive, avec une hausse de 319 % en juillet 2019 par rapport à l’année précédente[14]. Cette croissance devrait se poursuivre jusqu’en 2020, avec une prévision de 1 456 unités. La demande de logements a dépassé l’offre, car la migration internationale continue d’alimenter l’accroissement démographique dans la province. De plus, le marché de la revente de logements a connu une forte baisse au niveau de l’offre. L’augmentation de la demande de nouveaux logements poussera les industries de la construction et du transport vers une croissance à deux chiffres jusqu’en 2020 selon les prévisions du gouvernement[15].
La croissance économique a amélioré le marché du travail de l’Î.-P.-É. au cours des deux dernières années, et cette tendance devrait se poursuivre. Le taux de chômage dans la province était de 8,8 % en 2019, le plus bas depuis 1976. En 2019, 4 000 emplois supplémentaires ont été créés, ce qui représente la plus forte croissance annuelle depuis 1976[16]. Le succès du rendement du marché du travail dans la province dépendra de la disponibilité de la main-d’œuvre et de l’adéquation entre la demande et l’offre de travail. Toutefois, la province continue de faire face au vieillissement de la population, limitant le marché du travail, particulièrement dans les services liés aux soins de santé.
Le secteur manufacturier est l’un des plus grands secteurs privés de la province. Le tableau 4 montre que le secteur manufacturier est passé de 8,12 % en 2013 à 11,27 % en 2018. La demande pour les produits de l’Î.-P.-É. sur le marché de l’exportation a été impressionnante. Les exportations vers l’Inde et la Chine continuent de croître en Europe, avec des produits liés à l’aérospatial, aux produits chimiques et à la transformation alimentaire. La science des biotechnologies est un domaine dans lequel la province prévoit se développer. En 2017, les exportations de produits biotechnologiques ont augmenté de 17,5 %. En 2018, le gouvernement fédéral a investi dans BioVectra, l’entreprise de biotechnologie de l’Î.-P.-É.. L’expansion des biotechnologies dans la province génère une demande immédiate de main-d’œuvre qualifiée, et les principales parties prenantes de la province travaillent pour répondre rapidement à ces besoins[17].
Tableau 4 : PIB et emploi par industrie[18]
En termes d’emploi, le secteur de l’hébergement et des services de restauration joue un rôle important sur le marché du travail de l’Î.-P.-É., car il représente environ 9 % de l’emploi total. De plus, le secteur agricole de la province a fait un bond de 29 % entre 2017 et 2018, ce qui illustre bien la popularité de l’Î.-P.-É. en matière d’exportations. Les secteurs du commerce de détail et de gros ont été les principaux pourvoyeurs d’emplois de la province, tandis que l’emploi dans les soins de santé et l’aide sociale augmente au fil du temps, car la population continue de vieillir.
Technologie et compétences
La technologie change la nature du travail et les compétences nécessaires à celui-ci. Près de la moitié des activités professionnelles dans le monde ont le potentiel technique d’être automatisées[19]. Cela peut réduire la demande de main-d’œuvre dans certains domaines, tout en créant d’autres emplois nécessitant de nouvelles compétences dans d’autres domaines. L’inadéquation potentielle des compétences peut persister, coexistant avec une pénurie de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s.
Selon le sondage de l’Université Memorial auprès des employeurs de l’Atlantique, 37 % des employeurs de l’Î.-P.-É. ont signalé des pénuries de compétences dans les professions professionnelles, techniques et commerciales. Un sondage de l’APECA a souligné que 2 640 occasions sont attendues dans les professions techniques d’ici 2020[20]. La croissance de la biotechnologie et de l’aérospatial dans la province a également entraîné de fortes perspectives pour les biologistes, les chimistes et divers ingénieurs et ingénieures[21]. En fait, 20 % des gains d’emploi au cours de l’année dernière provenaient du secteur professionnel, scientifique et technique[22].
Pour faire face à la diminution de la main-d’œuvre et atténuer les pénuries et l’inadéquation des compétences, il convient d’appliquer une stratégie multidimensionnelle pour accroître la quantité et améliorer la qualité de la main-d’œuvre de l’Î.-P.-É.. Le gouvernement devrait se focaliser sur l’augmentation du taux de participation des sources de main-d’œuvre inexploitées, notamment les femmes, les travailleurs et travailleuses âgé.e.s, les Autochtones et les personnes en situation de handicap; sur le recyclage et le relèvement des compétences de la main-d’œuvre existante; sur l’attraction des insulaires qui ont déménagé pour qu’ils et elles reviennent chez eux et chez elles; ainsi que sur le développement d’un nouveau bassin de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s. Les immigrants et immigrantes, les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires, les réfugiés et réfugiées et les étudiants et étudiantes internationaux.ales sont des composantes importantes du nouveau bassin. Les politiques visant le recrutement et la rétention de ces groupes de travailleurs et travailleuses potentiel.le.s ont contribué à la réussite du marché du travail, de l’économie et des résultats sociaux du Canada[23].
Les migrations internationales constituent le principal vecteur de croissance démographique au Canada. Sa contribution à la croissance de la population a dépassé 80 % en 2019[24]. Selon Statistique Canada, la croissance de la population par l’immigration a été deux fois supérieure à l’accroissement naturel[25].
Comme le montre la figure 2, le nombre d’immigrants et immigrantes admis.e.s chaque année à l’Î.-P.-É. a augmenté progressivement depuis 2015, avec le lancement du Programme pilote d’immigration de l’Atlantique (PPIA) en 2017 et la fin du Programme d’immigration des entrepreneurs dans le cadre du Programme des candidats des provinces (PCP). Cette augmentation est la principale raison de l’accroissement démographique de l’Î.-P.-É. au cours des dernières années, malgré la baisse des naissances et le nombre croissant d’insulaires qui partent.
Environ deux tiers de tou.te.s les immigrant.e.s de la catégorie économique sont des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s et des entrepreneurs et entrepreneures admis.e.s par l’entremise du système de points, qui est basé sur plusieurs facteurs dont l’éducation, l’expérience, la langue et l’âge[26]. En conséquence, les immigrants et immigrantes admis.e.s par l’intermédiaire de ces catégories ont tendance à être plus instruit.e.s et plus jeunes que les travailleurs et travailleuses né.e.s au Canada[27],[28], ce qui signifie qu’ils et elles sont théoriquement plus productifs.ives et auront plus d’années d’activité économique. Les politiques d’immigration sont plus efficaces si elles sont liées à la demande de main-d’œuvre régionale, particulièrement dans les zones rurales et éloignées. Cette caractéristique fait partie du PCP, du PCM (Programme des candidats municipaux), du PPIA, du PPICRN (Programme pilote d’immigration dans les communautés rurales et du Nord) et du PPA (Programme pilote sur l’agroalimentaire). Dans un cas comme celui-ci, laissez-vous les acronymes avant le nom complet du programme, comme dans la version anglaise Grâce à ces programmes, de plus en plus d’immigrants et immigrantes viennent dans les provinces de l’Atlantique sur la base de leurs compétences et de leur expérience professionnelle recherchées dans la région ou la province, répondant ainsi à la demande du marché du travail local.
Figure 2. Nombre d’immigrants et immigrantes admis.e.s à l’Î.-P.-É., 2008-2019
Nombre d’immigrants et immigrantes
L’Î.-P.-É. connaît le plus grand afflux annuel de migrants et migrantes jamais enregistré. Comme le montre la figure 2, le nombre d’immigrants et immigrantes à l’Î.-P.-É. en 2018 a plus que doublé depuis 2013[29], la province ayant récemment connu une réussite dans le cadre du Programme pilote d’immigration au Canada atlantique (PPICA). Pour le premier semestre de 2019 seulement, le nombre de résidents et résidentes permanent.e.s admis.e.s par l’entremise du PPICA était de 640, soit presque deux fois plus que le chiffre de 375 en 2018. Même si la province a réussi à attirer des immigrants et immigrantes, elle devra encore recruter plus d’immigrants et immigrantes pour remplacer le grand nombre de baby-boomers qui prendront bientôt leur retraite et qui quitteront la population active dans les années à venir.
Ces dernières années, l’Î.-P.-É. a également eu du mal à retenir les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes. Comme le montre la figure 3, seul.e.s 16 % des immigrants et immigrantes sont resté.e.s à l’Î.-P.-É. cinq ans après leur arrivée. Il est frappant de constater que le taux de rétention de l’île est bien inférieur à celui du reste du Canada et même loin derrière le Nouveau-Brunswick (48 %) et Terre-Neuve-et-Labrador (53 %)[30]. Les secteurs public et privé ont reconnu le défi que représente la rétention des immigrants et immigrantes et ont apporté de nombreux changements aux programmes pour améliorer les taux globaux de rétention, notamment en supprimant les dépôts bloqués du volet des immigrants et immigrantes entrepreneur.e.s du PCP, en établissant des partenariats avec les collectivités de l’île désireuses d’accueillir des immigrants et immigrantes et en apportant des améliorations majeures aux services d’établissement et à la formation linguistique[31].
Figure 3. Taux de rétention des immigrants et immigrantes sur cinq ans par province, 2011-2015[32]
Éducation internationale
Les étudiants et étudiantes internationaux.ales apportent une contribution importante et croissante à la prospérité à court et à long termes du Canada. Les étudiants et étudiantes internationaux.ales génèrent des milliards de dollars de revenus et créent des dizaines de milliers d’emplois. Les étudiants et étudiantes internationaux.ales qui possèdent un capital humain de grande qualité, combiné à une expérience d’études au Canada, de solides compétences linguistiques et une bonne connaissance de la culture locale, constituent un bassin idéal pour la main-d’œuvre qualifiée. En fait, les étudiants et étudiantes internationaux.ales canadien.ne.s qui deviennent résidents et résidentes permanent.e.s obtiennent de meilleurs résultats que leurs homologues qui ont suivi des programmes universitaires similaires à l’étranger[33]. De plus, les étudiants et étudiantes internationaux.ales s’attèlent à acquérir une expérience professionnelle liée à leur domaine d’études. Selon le rapport du Conseil atlantique des ministres de l’Éducation et de la Formation[34], 14 % des étudiants et étudiantes internationaux.ales participent à des programmes coopératifs, ce qui leur confère une expérience professionnelle dans leur domaine de spécialisation.
Dans les provinces de l’Atlantique, chaque étudiant et étudiante internalational.e dépense environ 34 188 $ par an[35]. En 2017, l’Î.-P.-É. comptait 3 385 étudiants et étudiantes internationaux.ales de tous niveaux[36]. Actuellement, l’Î.-P.-É. compte huit établissements postsecondaires qui peuvent recruter des étudiants et étudiantes internationaux.ales. Les étudiants et étudiantes internationaux.ales du Collège de l’Île, du Collège Holland, du Maritime Christian College et de l’Université de l’Île-du-Prince-Édouard peuvent demander un permis de travail ouvert de trois ans après l’obtention de leur diplôme, ce qui leur donne une chance d’acquérir une expérience professionnelle canadienne et les encourage à rester au Canada. Au Canada atlantique, les étudiants et étudiantes internationaux.ales peuvent demander leur résidence permanente par l’entremise du volet des diplômés et diplômées étrangers.ères du PPICA. Tous ces efforts visent à attirer des étudiants et étudiantes internationaux.ales et à les encourager à rester à l’Î.-P.-É.. Le gouvernement de l’Î.-P.-É. s’est fixé pour objectif de retenir 10 % des étudiants et étudiantes internationaux.ales diplômé.e.s des établissements postsecondaires de la province. Le sondage de l’Université Memorial auprès des employeurs de l’Atlantique a montré que les étudiants et étudiantes internationaux.ales cherchaient activement un emploi à temps partiel. Environ 47 % des employeurs avaient reçu des demandes d’emploi d’étudiants et étudiantes internationaux.ales. Parmi ces employeurs, 30 % ont embauché des étudiants et étudiantes internationaux.ales. Parmi ceux et celles qui ont été embauché.e.s, 62 % travaillaient dans les secteurs du commerce de détail et de l’hébergement. De telles expériences ont également permis aux étudiants et étudiantes internationaux.ales de s’immerger dans la pratique et la culture des affaires canadiennes, de pratiquer l’anglais et de se constituer des réseaux sociaux et professionnels.
Travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires
Il existe deux programmes pour les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires : le Programme des travailleurs étrangers temporaires (PTET), qui exige une étude d’impact sur le marché du travail (EIMT), et le Programme de mobilité internationale (PMI), qui est dispensé de l’EIMT pour des raisons telles que les accords réciproques qui favorisent les échanges économiques, sociaux et culturels entre le Canada et d’autres pays[37]. Ces deux programmes permettent aux employeurs canadiens d’embaucher des travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires pour combler temporairement des pénuries de compétences et de main-d’œuvre à court terme. Il s’agit notamment de postes que les citoyens et citoyennes canadien.ne.s et les résidents et résidentes permanent.e.s ne peuvent ou ne veulent pas occuper, tels que le travail saisonnier[38], les professions hautement qualifiées dans le domaine de la technologie et les professions peu qualifiées dans le secteur des services[39]. En 2019, 84 145 travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires ont été admis.e.s dans le cadre du PTET et 229 320 dans le cadre du PMI.
Les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires peuvent également faire une transition vers le statut de résident et résidente permanent.e grâce à la catégorie de l’expérience canadienne, au Programme des candidats des provinces et au programme Entrée express[40]. Depuis 2002, une proportion croissante de nouveaux immigrants et nouvelles immigrantes ont acquis une expérience professionnelle au Canada avant leur arrivée. Le taux de transition des travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires vers la résidence permanente cinq ans après avoir reçu leur premier permis de travail est passé de 9 % pour ceux et celles qui sont arrivé.e.s entre 1995 et 1999 à 21 % pour ceux et celles arrivé.e.s entre 2005 et 2009[41].
Le sondage de l’Université Memorial auprès des employeurs de l’Île-du-Prince-Édouard montre que 58 % des employeurs ont signalé des difficultés à pourvoir des postes vacants au cours des trois dernières années, et les principales raisons de ces difficultés d’embauche étaient le « nombre trop faible » de candidats et candidates et le « manque de candidats et candidates possédant les compétences et les expérience requises ». Un nombre encore plus important d’employeurs (74 %) prévoyaient que la province ferait face à une pénurie plus grave de main-d’œuvre qualifiée au cours des trois prochaines années. Cette pénurie de main-d’œuvre pousse les employeurs à se tourner vers les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires. Les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires sont une solution importante pour réduire la pénurie de main-d’œuvre et de compétences à l’Î.-P.-É., du moins à court terme, car certaines entreprises sont dans une lutte « très acharnée » pour recruter des employés et employées[42]. En 2019, 950 et 1 760 permis de travail ont respectivement été délivrés dans le cadre du PTET et du PMI à l’Î.-P.-É., ce qui représente 3,12 % de la main-d’œuvre. Ces apports ont permis d’atténuer dans une certaine mesure les graves pénuries de main-d’œuvre et de compétences, particulièrement dans les secteurs très exigeants, tels que les soins de santé, l’agriculture, l’hébergement, la construction et les secteurs de haute technologie.
Points de vue des parties prenantes sur l’embauche et la rétention des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s
Les principales parties prenantes de l’Î.-P.-É., dont des organismes gouvernementaux, des entreprises et des établissements d’enseignement, ont fait part de leurs préoccupations concernant les pénuries de main-d’œuvre et de compétences dans la province. Les employeurs jouent un rôle crucial, car ils créent des emplois, embauchent des travailleurs et travailleuses et développent des pratiques innovantes en milieu de travail pour atténuer les pénuries de main-d’œuvre et de compétences. Leurs expériences et opinions sont extrêmement précieuses pour déterminer les domaines où il existe des pénuries, par secteur et par profession, et les solutions possibles pour atténuer ces pénuries à l’Î.-P.-É..
En décembre 2019, en collaboration avec le professeur Tony Fang et son équipe de recherche, le FPP a organisé une séance de consultation à Charlottetown, à l’Î.-P.-É., avec environ 50 employeurs de différents secteurs de la province pour discuter de sujets tels que :
- le type de pénurie de compétences auquel les employeurs font face;
- les difficultés que rencontrent les employeurs dans l’embauche des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s, notamment les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes;
- des exemples de politiques ou de pratiques réussies susceptibles d’aider à surmonter ces difficultés; et
- des propositions pour surmonter ces pénuries de compétences et améliorer l’embauche et la rétention des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s, notamment les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes.
- La consultation menée par l’entremise d’une discussion visait à :
- cerner les secteurs qui connaissent des pénuries de main-d’œuvre et de compétences;
- examiner les facteurs qui influencent les décisions des employeurs d’embaucher des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s, notamment les immigrants et immigrantes, les réfugiés et réfugiées, les étudiants et étudiantes internationaux.ales et les travailleurs et travailleuses étrangers.ères temporaires;
- cerner les facteurs qui renforcent et ceux qui ont des répercussions négatives sur les décisions des employeurs d’embaucher des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s et des nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes;
- cerner les pratiques du gouvernement et des autres parties prenantes susceptibles d’aider les employeurs à recruter des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s et des nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes; et
- déterminer les mesures à prendre pour augmenter le taux de rétention des travailleurs et travailleuses qualifié.e.s dans la province.
Les employeurs ont fait savoir qu’ils connaissaient des pénuries de compétences ou de main-d’œuvre très similaires. Les industries faisant face à des pénuries de compétences spécialisées sont les technologies de l’information, la construction, le transport routier et le transport, l’accueil, les usines de traitement du poisson et l’élevage piscicole, et l’éducation. Les employeurs ont également laissé entendre que ces pénuries créent des effets d’entraînement. Par exemple, le secteur de la construction a besoin de plus de charpentiers et d’opérateurs d’équipement lourd, mais il y a une pénurie locale de ces compétences et un manque de logements pour attirer ces compétences. La pénurie de logements de l’île fait grimper le prix de l’immobilier, ce qui pose des problèmes d’abordabilité. Les employeurs perdent des candidats et candidates potentiel.le.s lorsqu’ils n’ont nulle part où les loger. Une discussion a eu lieu sur le manque de compétences non techniques chez les immigrants et immigrantes récent.e.s. Plus précisément, les immigrants et immigrantes avaient besoin d’aide pour développer les compétences non techniques et les normes requises au Canada. Les employeurs ont également convenu que tous et toutes, tant les employeurs que les employés et employées des secteurs public et privé, ont besoin d’une formation sur la diversité pour améliorer la sensibilisation, les compétences et la communication interculturelles.
Les employeurs ont essayé de remédier à ces pénuries en revoyant régulièrement leurs systèmes de rémunération et en offrant de meilleurs salaires et avantages. Ils ont convenu que la compensation monétaire n’est pas suffisante, et ils développent des pratiques de travail plus accommodantes et plus sensibles à la culture. Certains employeurs invitent les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes à des événements communautaires et mettent l’accent sur l’importance qu’ils accordent aux diverses cultures en milieu de travail. Les programmes locaux tels que les programmes de formation Nouveaux arrivants dans les métiers spécialisés et Nouveaux arrivants dans les métiers de la restauration ont été particulièrement utiles. CGI Group Inc., cinquième plus grande entreprise de services informatiques et de processus d’affaires au monde, fournit également de bonnes solutions en matière de soutien à la diversité en milieu de travail.
La liste des défis que les employeurs doivent relever pour attirer et retenir leurs employés et employées est considérable. Comme dans les autres provinces de l’Atlantique, de nombreuses petites entreprises de l’Î.-P.-É. manquent de capacités en matière de ressources humaines, ce qui limite leur capacité à recruter des immigrants et immigrantes. Les petites entreprises ont également indiqué qu’elles avaient besoin d’aide pour relever les défis liés à la première embauche. Un défi commun à tous les employeurs est le coût élevé des EIMT. Plusieurs employeurs ont reconnu que le manque de soutien au conjoint et à la conjointe nuit aux taux de rétention.
Même si l’Île-du-Prince-Édouard attire un nombre disproportionné d’immigrants et immigrantes par rapport à sa faible population, la province fait face à une forte pénurie de main-d’œuvre et de travailleurs et travailleuses qualifié.e.s possédant des compétences précises, qu’elles soient spécialisées ou non techniques. Les employeurs ont également du mal à retenir les travailleurs et travailleuses en raison du manque de logement, de transport, de soutien communautaire, y compris de soutien au conjoint et à la conjointe et à la famille. Les pénuries de compétences sont plus fréquentes dans des secteurs comme les technologies de l’information, la construction, les soins de santé, l’accueil, les usines de traitement du poisson et l’élevage piscicole. Ces pénuries obligent certaines entreprises à fonctionner uniquement de manière saisonnière ou à une capacité de production réduite. Dans les zones rurales de la province, les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes manquent de transports publics et d’accès à Internet, ce qui les empêche de rester dans la zone rurale. L’île connaît de nombreux problèmes auxquels font face les autres provinces de l’Atlantique, tels que le manque de sensibilisation du public à l’immigration et la capacité limitée des petites entreprises à recruter. Les employeurs sont prêts à embaucher des immigrants et immigrantes et des étudiants et étudiantes internationaux.ales parce qu’ils et elles possèdent les compétences requises pour ces emplois et une solide éthique du travail. Cependant, des systèmes compliqués de reconnaissance de diplômes, des processus d’immigration longs et coûteux, particulièrement les EIMT, et des préoccupations concernant les faibles taux de rétention et les différences culturelles entravent les efforts des employeurs pour embaucher et retenir les immigrants et immigrantes. L’économie de l’Î.-P.-É. étant sur le point de connaître une croissance continue, c’est le moment indiqué pour résoudre ces problèmes pour assurer la prospérité à long terme.
Les employeurs et les représentants et représentantes du secteur consulté.e.s à Charlottetown ont formulé les principales recommandations suivantes :
Élaborer et améliorer les politiques d’immigration qui répondent aux besoins des employeurs locaux, notamment le PCP, le PCM, le PPICA, le PPICRN, le PPA.
Le gouvernement, les employeurs et les promoteurs immobiliers doivent travailler ensemble pour résoudre la pénurie de logements à l’Î.-P.-É.. Des villes comme Tofino, en Colombie-Britannique, qui ont très récemment résolu des problèmes de ce genre, constituent des bons exemples à suivre. Des initiatives telles que les quartiers communautaires, l’augmentation du nombre de logements pour les employés et employées et les logements publics abordables pourraient atténuer la pénurie de logements dans la province.
Accroître le soutien communautaire aux nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes, y compris le soutien au conjoint et à la conjointe et à la famille. Mettre en place un projet pilote ciblé sur l’amélioration du soutien au conjoint et à la conjointe et à la famille, comme des services de garde d’enfants abordables, des soins de santé, l’éducation des enfants, etc. pour soutenir l’établissement là où des compétences sont nécessaires.
Développer des moyens de transport et des infrastructures accessibles pour soutenir la rétention des immigrants et immigrantes dans les collectivités rurales. Le gouvernement local et les employeurs devraient travailler ensemble pour développer des infrastructures telles que l’accès à Internet et les réseaux.
Travailler avec des organismes de certification tiers pour accélérer l’amélioration de la reconnaissance des diplômes étrangers.
Les organismes d’établissement doivent travailler avec les employeurs et les établissements de formation pour développer et améliorer la formation linguistique adaptée à l’emploi et les programmes de transition pour les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes afin de s’aligner sur les besoins en compétences du marché du travail local. Promouvoir les programmes de formation professionnelle à l’intention des immigrants et immigrantes, tels que les programmes de formation Nouveaux arrivants dans les métiers spécialisés et Nouveaux arrivants dans les métiers de la restauration.
Offrir une formation de sensibilisation aux cultures et à la diversité aux employeurs et aux employés et employées des secteurs public et privé pour améliorer la compréhension mutuelle et de réduire les conflits culturels et la discrimination sur le marché du travail.
Faire de l’Î.-P.-É. une communauté d’accueil. Utiliser toutes sortes de canaux, particulièrement les réseaux sociaux et les médias sociaux, pour démontrer la contribution des immigrants et immigrantes à l’Î.-P.-É. et sensibiliser les personnes à la manière de relever les défis réels des immigrants et immigrantes dans le monde du travail. Impliquer les nouveaux arrivants et nouvelles arrivantes dans les événements communautaires pour renforcer leur sentiment d’appartenance.
Référence
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