Aperçu du développement de la main-d’œuvre des services de garde d’enfants aux Territoires du Nord-Ouest
Écrit par le personnel de la YWCA NWT
Aux Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.), les services de garde d’enfants sont régis par la Loi sur la garde d’enfants des Territoires du Nord-Ouest et réglementés par le ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi. Pour comprendre les services de garde d’enfants aux T.N.-O., il est important de comprendre la composition du territoire et la façon dont les services structurés sont répartis.
La région politique des Territoires du Nord-Ouest (T.N.-O.) est un grand territoire peu peuplé, qui compte environ 45 500 habitants. Le territoire reconnaît 11 langues officielles, bien que l’on y parle au moins 50 dialectes. La communauté de Sombaa K’e/Yellowknife est située sur les terres traditionnelles de la Première Nation des Dénés Yellowknives (territoire du chef Drygeese) et a récemment été reconnue comme les terres d’origine de la North Slave Métis Alliance. Il s’agit de la plus grande communauté du territoire, avec environ 22 000 résidents, et c’est là que l’on trouve la plus grande proportion de prestataires de services structurés, y compris les services gouvernementaux et les services sans but lucratif. Avec Sombaa K’e/Yellowknife, les autres communautés les plus peuplées des T.N.-O. sont Hay River et Inuvik. À elles trois, ces communautés représentent environ 69 % de la population, tandis que les autres résidents des T.N.-O. (31 %) vivent dans 29 communautés plus petites.
L’accès aux services structurés dépend de l’endroit où l’on vit, et les petites communautés ont moins accès (en anglais) aux services de santé, d’éducation et de protection sociale ainsi qu’aux occasions économiques. De nombreuses petites communautés ne comptent pas de services de garde et de foyers de jour agréés, où les services de garde d’enfants sont gérés comme petites entreprises à domicile. De plus, en raison du colonialisme et d’une myriade de facteurs culturels, historiques, géographiques et sociopolitiques complexes et interdépendants, il existe moins de possibilités économiques viables pour les personnes à la recherche d’un emploi et d’une stabilité financière dans les petites communautés, ce qui influe à son tour sur l’accès relatif aux services de garde structurés et sur la capacité de la communauté à ouvrir et à entretenir des services d’apprentissage approuvés par le ministère de l’Éducation et des services de garde des jeunes enfants agréés.
Comme on peut l’observer à travers le pays, la prestation de services d’éducation de la petite enfance (EPE) basée sur le marché complique l’établissement d’une qualité de soins dans l’ensemble du secteur. Bien que le gouvernement des T.N.-O. reconnaisse la nécessité de développer des services de garde culturellement pertinents pour les enfants autochtones dans la Stratégie 2030 sur l’éducation et la garde des jeunes enfants, les objectifs détaillés font défaut, puisque cette stratégie ne compte que 27 pages. Le ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi n’a pas encore publié d’objectifs substantiels, autres que celui d’augmenter le nombre de programmes d’ éducation de la petite enfance offerts et de les rendre plus abordables et culturellement pertinents.
Contexte actuel
Le système de garde d’enfants des T.N.-O. se compose de foyers de jour familiaux non agréés, de foyers de jour agréés, de garderies sans but lucratif et de garderies à but lucratif. Les foyers de jour familiaux non agréés sont autorisés à accueillir quatre enfants au total. Les foyers de jour agréés peuvent accueillir jusqu’à :
- huit enfants âgés de plus de trois ans; ou
- six enfants âgés de un à trois ans; et
- pas plus de deux nourrissons.
Les centres de garde sont invités à communiquer avec les spécialistes de la garde d’enfants du ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi du gouvernement des T.N.-O. pour obtenir des précisions sur le nombre d’enfants autorisés dans chaque catégorie d’âge s’il y a un groupe d’enfants d’âges différents, car ces précisions ne sont pas publiées.
Pour obtenir un permis, les foyers de jour doivent demander un permis d’exploitation de commerce, détenir un compte bancaire et une assurance d’affaires ainsi que disposer de l’environnement approprié. L’exploitant.e principal.e doit avoir obtenu un diplôme postsecondaire en développement de l’enfant ou avoir l’intention d’obtenir un diplôme en développement de l’enfant. Il ou elle doit également participer à une formation annuelle et il existe des incitatifs à la formation continue comme des subventions trimestrielles de développement professionnel.
Les garderies suivent les mêmes règlements que les foyers de jour agréés. Toutes les garderies et tous les foyers de jour, agréés ou non, sont soumis à la Loi sur la garde d’enfants. La surface d’espace libre et utilisable pour les garderies et les foyers de jour agréés doit être d’au moins 2,75 mètres carrés par enfant (en anglais) et ne comprendre que les espaces que les enfants peuvent utiliser.
Il existe de grandes disparités dans la qualité des soins que reçoivent les enfants et de nombreux facteurs qui influent sur cette qualité, notamment les coûts que les parents sont en mesure de payer.
Les frais de garde d’enfants varient de 800 $ pour les foyers de jour non agréés à 1 400 $ pour certains foyers de jour ou garderies privés. Certaines installations privées ont tendance à avoir un meilleur accès à l’entretien des bâtiments que les garderies sans but lucratif, ce qui entraîne de meilleurs salaires et un meilleur développement de la main-d’œuvre, car les organismes sans but lucratif doivent souvent équilibrer les coûts d’infrastructure avec d’autres dépenses qui influencent la qualité des soins que reçoivent les enfants. De nombreux organismes sans but lucratif manquent également d’infrastructures appropriées pour leurs programmes en général. Il existe un certain financement pour les coûts de démarrage des garderies qui louent leurs locaux, mais les locataires n’ont pas accès au financement des infrastructures qui pourrait les aider à améliorer leurs locaux. L’écart dans la qualité des soins réside en grande partie dans la capacité des parents à payer de meilleurs salaires, de meilleures fournitures et du meilleur équipement aux prestataires de services de garde d’enfants.
Citons comme autre différence entre les garderies sans but lucratif et les garderies privées le fait que les garderies sans but lucratif font l’objet d’un examen financier plus minutieux pour veiller à ce que les revenus soient comptabilisés de manière appropriée, et que les garderies sans but lucratif ne reçoivent pas de revenus supplémentaires pour les frais d’administration. De même, certains foyers de jour et certaines garderies privées plus abordables peuvent également avoir du mal à obtenir un soutien administratif approprié. Si une seule personne gère un foyer de jour et garde des enfants de 8 h à 17 h, elle doit voir au côté administratif de l’entreprise après ces heures.
Pour comprendre les salaires que reçoivent les prestataires de services de garde d’enfants, il est important de comprendre d’abord ce qu’est le salaire de subsistance aux T.N.-O. En 2022, le salaire de subsistance a été calculé à 23,28 $ à Yellowknife (en anglais), à 21,32 $ à Hay River et à 22,59 $ à Inuvik. Ces calculs utilisent la méthodologie du Canadian Living Wage Framework (Cadre canadien des salaires de subsistance) et correspondent à un salaire de subsistance pour un ménage biparental à deux revenus avec deux enfants. Le salaire minimum aux T.N.-O. est de 15,20 $ l’heure.
Les taux de rémunération des travailleuses et des travailleurs des services de garde d’enfants se situent généralement entre 19 $ l’heure et 25 $ l’heure pour les employées et employés qui ont une formation en garde d’enfants. Quant aux exploitant.e.s de garderies privées agréées, ils ou elles peuvent recevoir un salaire similaire, mais leur revenu réel peut être plus proche ou même inférieur au salaire minimum, selon la qualité des fournitures et de la nourriture qu’ils et elles fournissent aux enfants. Les garderies agréées, y compris les prestataires de services de garde sans but lucratif, sont admissibles à une subvention pour le personnel en développement de la petite enfance du ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi des T.N.-O. Cette subvention est calculée en fonction du nombre d’heures travaillées par trimestre et diffère selon le niveau d’éducation de la travailleuse ou du travailleur. Par exemple, pour les cadres supérieurs du programme de garde parascolaire d’enfants du centre YWCA des T.N.-O., le complément est de 4,11 $ l’heure, en plus d’un salaire de 22,47 $ l’heure – des salaires élevés pour le secteur.
Effectif existant
La main-d’œuvre des services de garde d’enfants des T.N.-O. diffère d’une communauté à l’autre. À Yellowknife, la main-d’œuvre se compose en grande partie de femmes à revenu faible ou moyen. Bon nombre d’entre elles sont des immigrantes récentes, mais il y a aussi une grande diversité de personnes. La dotation en personnel des garderies représente un défi et le roulement du personnel a tendance à être élevé, car les employées et les employés peuvent trouver des salaires plus élevés dans d’autres milieux de travail. La COVID a exacerbé une situation déjà difficile, et certains programmes de garde d’enfants ont été contraints de fermer pendant la pandémie.
La demande en services de garde d’enfants dépasse de loin l’offre, et il faut s’y prendre longtemps à l’avance pour obtenir des services de garde dans les communautés qui offrent des options structurées de garde d’enfants.
Des inquiétudes surgissent lorsque le nombre de places disponibles est privilégié par rapport à la qualité des soins que reçoivent les enfants (en anglais).
Le fait que les éducatrices et les éducateurs de la petite enfance soient traités comme des gardiennes et des gardiens d’enfants et non comme des enseignantes et des enseignants qualifié.e.s contribue à cette situation. Cette préoccupation est grandement exacerbée dans les garderies des petites communautés, où la dotation en personnel est plus difficile. Il existe également des défis structurels dans l’administration de l’EPE, car il n’y a que trois conseillères et/ou conseillers en petite enfance pour le territoire. Ces trois personnes sont responsables de la supervision d’environ 100 programmes sur un vaste territoire.
Développement de la main-d’œuvre
En ce qui concerne les possibilités d’éducation, des ateliers sont offerts en personne aux travailleuses et aux travailleurs de la petite enfance, et ce, sur une base annuelle. De plus, les travailleuses et travailleurs en petite enfance qui s’inscrivent à un programme menant à un diplôme ou à un grade en petite enfance peuvent demander bourse d’études pour un Programme d’éducation et de garde des jeunes enfants d’une valeur de 5 000 $ au ministère de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi. D’autres fonds d’éducation peuvent être disponibles pour une personne en fonction du nombre d’années qu’elle a vécu aux T.N.-O. et si elle est Autochtone des T.N.-O.
Entente bilatérale
Les T.N.-O. ont signé le Plan d’apprentissage et de garde des jeunes enfants pancanadien, l’entente de financement fédérale-provinciale qui vise à réduire les frais de garde d’enfants à 10 $ par jour pour les parents d’ici la fin de 2026. À la suite de cette entente bilatérale, les T.N.-O. ont commencé à travailler à la mise en œuvre d’une subvention pour la réduction des frais de garde d’enfants. Cette subvention a été annoncée publiquement et les parents s’attendent à recevoir une somme rétroactive de janvier 2022 à aujourd’hui. Malheureusement, le déploiement de ce programme a été prématuré et la plupart des prestataires de services de garde d’enfants n’ont pas été en mesure d’effectuer les tâches administratives nécessaires pour remplir les demandes de subvention. Le déploiement de la subvention a donc été repoussé (en anglais) et on ne sait pas quand le secteur aura la capacité de verser ces fonds aux parents.
Une Stratégie 2030 sur l’éducation et la garde des jeunes enfants a été publiée. La stratégie est assez brève en ce sens qu’elle énonce une mission et des valeurs pour le développement du secteur, mais les détails sur la façon d’atteindre des résultats mesurables et ciblés restent vagues. Selon la stratégie, l’une des principales mesures du succès « l’augmentation du nombre de garderies agréées et de places en garderie partout aux T.N.-O. au fil du temps ».
Afin de développer davantage le secteur aux T.N.-O. et de créer plus de programmes de garde d’enfants de qualité, les EPE ont besoin à la fois d’un soutien administratif pour s’assurer que les organes directeurs sont sensibles aux défis qu’ils rencontrent, et d’un soutien financier pour s’assurer qu’ils peuvent rester dans le secteur. Ils ont également besoin d’aide en matière d’infrastructure et de fonds pour créer des places supplémentaires. Le gouvernement des T.N.-O. a besoin de spécialistes supplémentaires en matière de garde d’enfants ainsi que d’autres employé.e.s supplémentaires pour l’aider à administrer des initiatives comme la subvention pour la réduction des frais de garde d’enfants. De plus, les T.N.-O. n’ont pas d’association professionnelle pour les EPE. Une association professionnelle pourrait aider à créer une voix collective pour les EPE afin d’aider à informer les décideurs et à défendre les EPE et les enfants, les parents et les communautés qu’ils servent.