Nouvelles organisations du travail
Points Clés
- Une part importante des entreprises prévoient qu’elles conserveront les modalités de travail à distance même une fois la pandémie terminée.
- Le fait que le degré de télétravail varie selon le niveau de scolarité et la profession et que les exigences en matière d’infrastructures favorisent les régions urbaines plutôt que rurales signifie que les Canadiens et les Canadiennes sont entré.e.s dans l’ère de la pandémie avec un potentiel inégal de télétravail. Cela pourrait aggraver les inégalités de revenu existantes.
- Bien qu’il y ait une discussion sur l’accès des travailleurs.euses à l’équipement nécessaire, à l’espace physique et à l’infrastructure technique de soutien pour le travail à distance, il faut accorder plus d’attention aux compétences requises pour effectuer la transition et être efficace en travaillant à distance.
Sommaire
À la suite de l’une des crises sanitaires les plus difficiles depuis un siècle, un grand nombre d’employeurs.euses et d’entreprises au Canada se sont tournés vers le télétravail au début du printemps 2020. Alors qu’avant la pandémie, seulement 13 % des effectifs faisaient du télétravail, à la fin de mars 2020, c’était le cas de quatre travailleurs.euses canadien.ne.s sur dix. De même, la part des entreprises dont au moins la moitié de la main-d’œuvre travaillait à distance est passée de 12 % au début du mois de février à 51 % en août 2020.
Le présent rapport explore le télétravail en tant que nouvelle modalité de travail au Canada. Nous discutons de la prévalence du télétravail, de la manière dont les travailleurs.euses et les gestionnaires s’adaptent à cette évolution rapide, et de l’inégalité dans l’accès et dans les capacités en matière de télétravail. Ces discussions permettent de mettre en évidence le développement des compétences nécessaires à la transition vers des modalités de télétravail efficaces au Canada.
Par rapport aux années précédentes, de nombreux.ses Canadien.ne. font du télétravail pendant la pandémie, et plus du quart déclarent qu’ils/elles le feront tout au long de 2020. Le taux le plus élevé a été signalé au printemps 2020, lorsque quatre employé.e.s sur dix pratiquaient le télétravail. La prévalence du télétravail a été la plus élevée en Ontario et au Québec et la plus faible au Nunavut. Bien qu’il y ait une certaine différence entre ces régions avant la pandémie, celle-ci a augmenté de façon spectaculaire pendant la pandémie, et le Québec a connu la plus forte augmentation du télétravail.
Malgré la transition rapide vers le télétravail et le caractère sans précédent de la pandémie, la majorité des travailleurs.euses sont satisfait.e.s de leur expérience de télétravail. Les résultats d’enquêtes menées auprès des télétravailleurs.euses montrent que la satisfaction augmente avec la temps passé en télétravail. Parmi les conditions qui ont conduit à une meilleure adaptation au télétravail, on peut citer :
- de bonnes conditions pour le télétravail à domicile;
- un accès satisfaisant aux outils professionnels;
- l’aisance avec les technologies de l’information et des communications (TIC); et
- le soutien des employeurs.euses.
Cependant, l’isolement social dû au travail à distance était associé négativement aux indicateurs mesurant l’adaptation au télétravail.
Une part importante des travailleurs.euses, ainsi que des employeurs.euses, disent vouloir poursuivre les modalités de télétravail après la pandémie. Plus de la moitié des travailleurs.euses disent qu’ils/elles opteraient pour le télétravail si on leur en donnait le choix. De même, 30 % des entreprises prévoient de permettre à au moins la moitié de leur main-d’œuvre de télétravailler après la pandémie.
Il existe cependant des inégalités en matière d’accès au travail à distance et de capacité au Canada. Les travailleurs.euses des secteurs à forte intensité de savoir sont plus susceptibles de travailler à distance que ceux/celles du secteur des services. Et les personnes qui ont un niveau de scolarité plus élevé sont plus susceptibles de pratiquer le télétravail que celles qui ont un niveau de scolarité secondaire ou inférieur. Les habitants de zones rurales sont moins susceptibles de télétravailler que les citadins. Dans l’ensemble, le cumul des obstacles au télétravail a eu pour conséquence que les travailleurs.euses les plus pauvres ont moins de possibilités de télétravail.
Étant donné que la capacité à télétravailler est étroitement liée à la sécurité d’emploi des travailleurs.euses pendant la pandémie, elle a des répercussions sur l’emploi et sur l’inégalité des revenus. Le télétravail semble favoriser les femmes et les immigrant.e.s. Proportionnellement, plus de femmes que d’hommes et plus d’immigrant.e.s que de personnes nées au Canada se sont tournés vers le télétravail pendant le confinement. D’un autre côté, les Autochtones et les personnes handicapées accusent un retard dans la transition vers le travail à distance. Les Canadien.ne.s sont également confronté.e.s à différents niveaux d’accès à l’Internet à haut débit, ce qui aura une influence sur la capacité de télétravail dans les années à venir. Alors que 86 % des ménages ont accès à la vitesse Internet recommandée, ce taux tombe à 40 % dans les régions rurales et à 30 % dans les collectivités des Premières Nations.
Bien que l’ampleur ne soit pas encore connue, il est évident que le nombre de télétravailleurs.euses canadien.ne.s sera nettement plus élevé après la pandémie que ces dernières années. Au-delà de l’infrastructure physique et technique nécessaire au télétravail, un large éventail de compétences est également requis pour garantir que les travailleurs.euses puissent télétravailler de manière adéquate.
Nous devons investir dans le développement des compétences pour combler les déficits en matière de compétences essentielles et permettre à la main-d’œuvre de pratiquer le télétravail efficacement. Les compétences numériques sont les plus urgentes et les plus fondamentales pour travailler à distance. Cependant, il faut également accorder plus d’attention au soutien des travailleurs dans l’acquisition et le renforcement des compétences non techniques, des compétences en matière de gestion du temps, des habitudes de travail saines et de la gestion des émotions afin de promouvoir le bien-être général au travail. Pour les gestionnaires, les compétences de gestion comme la direction d’équipes en cas de crise, la communication efficace avec une équipe à distance, l’encadrement et le mentorat peuvent être davantage privilégiées en cette ère de télétravail.
Le développement des compétences est une responsabilité partagée. Les travailleurs.euses doivent définir les lacunes dans leurs compétences et investir dans une formation et dans l’amélioration de leur qualifications. Les organisations doivent investir de manière significative dans la formation de leurs travailleurs.euses, tant les employé.e.s que les cadres, afin de préserver leur bien-être et maintenir leur productivité. Le gouvernement devrait rapidement s’appuyer sur les initiatives existantes pour mettre à la disposition des Canadien.ne.s une série de programmes globaux afin de combler les déficits actuels et émergents en matière de compétences. Le gouvernement peut également concevoir des politiques incitant les employeurs.euses et les travailleurs.euses à investir dans les compétences et la technologie qui peuvent les aider à passer à une plus grande productivité. Par ailleurs, les fournisseurs de services peuvent jouer un rôle important en facilitant l’accès aux programmes de développement des compétences.
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Les compétences dans un mode post pandémique est financé par le programme Compétences futures du gouvernement du Canada.
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