Le risque du statu quo numérique
Comment les gouvernements peuvent-ils promouvoir la transformation numérique?Résumé
Partout dans le monde, les gouvernements récoltent les fruits des technologies numériques, lesquels se traduisent par l’optimisation du rendement, la création de nouveaux services et l’amélioration de l’ouverture et de la transparence. Toutefois, l’adoption de la technologie se heurte parfois à l’aversion au risque et aux perceptions des dirigeants gouvernementaux. Les dirigeants ont tendance à se focaliser sur l’évaluation des coûts et des risques liés à l’adoption de nouveaux systèmes et mécanismes et ne tiennent pas toujours compte des risques associés au maintien du statu quo.
Le présent document examine les conséquences de l’incapacité à adopter les technologies numériques pour améliorer les services publics au Canada. Il a été éclairé par une série d’entrevues, un sondage et une table ronde avec de hauts fonctionnaires canadiens. L’analyse s’est également appuyée sur les connaissances de 16 dirigeants gouvernementaux, actuels et anciens, du Royaume-Uni, d’Écosse, de Nouvelle-Zélande, d’Australie, de Finlande, des États-Unis et du Canada pour comprendre le contexte mondial de cette question et trouver de nouvelles approches pour relever ce défi.
Le maintien du statu quo présente quatre grands risques :
- Le risque lié aux systèmes anciens découle de l’utilisation de technologies désuètes auxquelles les concepteurs ne fournissent parfois plus de soutien technique, dont l’entretien exige des compétences spéciales ou des dépenses considérables, ou qui créent des obstacles à l’intégration dans les nouvelles technologies. Ce risque comprend les répercussions de méthodes d’approvisionnement archaïques qui amènent les gouvernements à maintenir les systèmes anciens plutôt que de chercher de nouvelles technologies performantes. La prise en compte du risque lié aux systèmes anciens donne une image plus globale de ce que coûte le statu quo par rapport à la transformation numérique.
- Le risque de cybersécurité augmente avec l’utilisation de systèmes anciens en raison des vulnérabilités causées par l’incapacité à les sécuriser et l’absence de mises à jour. Lors de l’évaluation des risques liés à la transformation numérique, le remplacement des systèmes anciens doit être considéré comme une question de cybersécurité.
- Le risque pour la culture et les personnesest multiforme : premièrement, le fait d’être en retard sur les transformations numériques peut pousser les talents émergents vers un marché du travail plus compétitif et plus numérique. Deuxièmement, la culture organisationnelle peut avoir tendance à stagner, créant un obstacle considérable à la transformation numérique.
- Le risque d’interruptions du service augmente, car le fossé entre la prestation des services gouvernementaux et les attentes de la population s’élargit. Si le gouvernement ne tient pas compte des attentes, il risque de perdre son attrait, de causer de la frustration et d’éloigner les citoyens et citoyennes.
Les gouvernements doivent prendre en considération le risque lié au maintien du statu quo, et non seulement les risques découlant du changement et de la modernisation.Les stratégies définies pour faire face au risque du statu quo consistent à :
- Tenir compte de l’entretien des systèmes anciens lorsque la transformation numérique est envisagée. Cela devrait inclure le coût des compétences, le risque de ne plus comprendre le fonctionnement et d’assurer le soutien technique des systèmes anciens et l’accumulation de la dette technique dans ces systèmes. Cette analyse supplémentaire fournira un tableau beaucoup plus complet des décisions relatives à la transformation numérique, des économies de coûts et des mesures d’atténuation des risques qui pourraient être réalisées grâce à la transformation. L’examen des procédures d’approvisionnement désuètes permettra également de prendre en considération les possibilités numériques à long terme.
- Envisager la nécessité de remplacer les systèmes anciens sous l’angle de la cybersécurité pour lui donner plus de poids. La meilleure façon d’évaluer les répercussions possibles de la transformation numérique est de les comparer au risque potentiellement plus grand de problèmes de cybersécurité, comme une violation de données – et celui d’être exposé et blâmé publiquement.
- Tenir compte du coût financier des risques pour la cybersécurité posés par les systèmes anciens. Lorsqu’elles évaluent le coût global de la transformation numérique, les organisations victimes d’une violation de données doivent prendre en considération la perte de données, la perturbation des activités, les sanctions prévues par la réglementation et les autres facteurs. Cela fournit un tableau plus complet de l’analyse globale des risques nécessaire pour apporter une modification.
- Utiliser la transformation numérique pour attirer et retenir les talents. Le passage à une culture organisationnelle numérique et l’ouverture à la flexibilité, à l’innovation et à l’adoption rapide de la technologie peuvent réduire le risque de perdre ou de ne pas attirer du personnel qualifié. Dans un environnement où les secteurs privé et public se disputent les meilleurs employés, il est indispensable de comprendre comment la transformation numérique peut attirer les talents.
- Tenir compte des risques liés à la pertinence du gouvernement et à l’engagement des citoyens et des citoyennes, qui est maintenant un indicateur de rendement clé pour de nombreux gouvernements. Les gouvernements doivent améliorer la façon dont ils fournissent les services pour répondre aux besoins de la population. Résister à la transformation numérique risque de refréner cet engagement.
Le statu quo représente un risque important et devrait être un élément central du processus global d’évaluation des risques de toute initiative de transformation numérique.